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Le blog politique de Jean Beaumont
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Le programme 2017 du FN était idiot.

11 juillet 2017 à 9:36, 1 commentaire

Quoiqu’on puisse penser du volet sociétal des promesse FN (immigration maîtrisée, lutte contre l’islamisme, retour à l’ordre, etc.) toutes résolutions qui ne peuvent qu’être soutenues sous réserve d'une application raisonnée, il y a eu hélas le reste, largement moins réaliste. 

Chacun sait que le gourou Philippot lorgne du coté de la gauche, en direction de laquelle il interprète la danse des sept voiles depuis plusieurs années, avec un succès certain : la majorité des ex-communistes s’est tourné vers le FN, tout comme le vote ouvrier, qui a basculé (tout ceci avant l'arrivée de la fusée Mélenchon). Fort logiquement, le programme 2017 de la candidate Marine a repris les axes majeurs de cette inflexion idéologique sauce Florian, dans une tonalité que ne renierait pas feu Jacques Duclos, flanqué de l’enragée Jeannette Vermeersch. Revenons donc sur ce programme (en gros le même que celui qui avait échoué en 2012).

 Je dépense, donc je suis

Aucun parti de gauche n’a jamais osé produire un tel catalogue à la Prévert de dépenses non financées. Le budget de la Défense est ainsi augmenté de 40 milliards, avec notamment la mise en chantier d’un inutile porte-avions.  Le FN crée en outre une "prime de pouvoir d'achat " de 80 euros par mois pour tous les salariés sans distinction, ainsi que pour les retraités gagnant moins de 1500 euros. C’est fort généreux mais qui financera ce beau geste se traduisant en milliards ? Le FN revalorise aussi les prestations sociales, pourtant sources de fraudes multiples et de déficits, et promet des recrutements tous azimuts dans la police, la gendarmerie, la magistrature, les douanes et les hôpitaux. C’est la fête ! La réduction du nombre de fonctionnaires ? Pas question, on embauche ! Au final, selon le très neutre Institut de l'entreprise, organisme proche des PME, l'addition s'élèverait à au moins 85 milliards de dépenses nouvelles – sans prendre en compte l’augmentation des dépenses liées à la Défense évoquées précédemment. Selon le commandant en second Philippot, l'Etat devrait aussi assumer deux investissements très lourds : la création de 40 000 places de prison, acte en soi non critiquable, mais qui coûterait près de 5 milliards d’euros, adjoint à la nationalisation des sociétés d'autoroutes (là on nage dans le productivisme soviétique des années cinquante), évaluée à 30 milliards par les experts ! Passons au chapitre des retraites. Florian est le seul, avec les chevelus du Front de Gauche, à prôner une retraite à 60 ans - elle est à 62 à l’heure actuelle - quand l'âge légal recule au fur et à mesure que s'allonge l'espérance de vie dans les pays développés. La France  a déjà l'âge de départ effectif en retraite le plus précoce : 59,4 ans en moyenne à cause des régimes spéciaux délirants du secteur public , contre 64,6 ans en moyenne dans les pays de l'OCDE. Or la France est un pays à la pyramide des âges inversé, c’est à dire qu’il y a plus de personnes âgées que de jeunes gaillards, pour faire court ; la partie de Molière consacre 15 % de son PIB à la seule gestion des retraites. Le régime général n'est revenu à l'équilibre que très récemment. Selon une étude du ministère des Affaires sociales, le recul de deux ans de l'âge légal inclus dans la loi Woerth de 2010 permettra d'améliorer le solde du régime général de 14,4 milliards en 2020 et de 12,7 milliards à horizon 2040. Or le démiurge de la rue des Suisses veut revenir aux 40 années de cotisation, comme son alter égo Mélenchon. A la clé, un manque à gagner immédiat estimé à près de 16 milliards. Au total ce projet utopique creuserait, selon les projections du Ministère, un trou de 32 milliards en 2040, et ce pour les seules retraites du régime général, hors fonction publique et régimes complémentaires.

Regardons à présent à la fameuse sortie de l’Euro. Beaucoup souhaitent le retour au Franc, en s’appuyant sur l’exemple heureux du Brexit. Hélas, il faut tempérer l’enthousiasme de ces ardents patriotes. Il y a deux différences de taille entre la Grande Bretagne et nous : d’une part un taux d’endettement par ménage bien plus faible, mais surtout, outre-Manche, une monnaie nationale, la Livre Sterling ! En effet, les adeptes du rosbeef à la menthe n’ont jamais, contrairement aux imprudents gaulois, adopté l’Euro ; ils ont adhéré à l’Espace Européen en conservant leur indépendance monétaire, tout comme les avisés suédois et les rusés Danois. La sortie de l’Europe n’a donc pas d’impact direct sur leur devise.

Vol au dessus d’un nid de cocus

Redonner à la France sa souveraineté est fort louable, sauf si on a une dette extérieure libellée en euros qui s'élève déjà à 325 % du PIB, Etat et secteur privé confondu, pour un montant digne de l’Everest (6 300 milliards). Les économistes du FN ont cru avoir trouvé la parade : ils brandissent la vieille recette de la lex monetae, qui autorise en théorie un pays à renommer sa dette dans la monnaie de son choix. L'essentiel de la dette publique étant sous contrat français, l'Etat rembourserait ainsi les prêteurs étrangers en Francs et leur ferait payer le coût inévitable de la dévaluation consécutive à la sortie de l’Euro. Tout ceci semble séduisant, mais dans les faits le principe de la lex monetae s’avère inapplicable : rompre unilatéralement les contrats actuels en changeant de devise entrainerait la cessation immédiate des prêts à court terme. Leur reconduction serait, à la suite d’un bras de fer inévitable, accordée en échange de l’augmentation des taux d’intérêts, comme par exemple chez nos voisins Grecs, qui empruntent désormais à des taux de l’ordre de 8 % parce qu’ils se trouvent en situation de faiblesse. Il se trouve que la situation de la France est la suivante : chaque jour, nous empruntons sur les marchés à peu près 280 millions d’Euros pour joindre les deux bouts, auquel il convient d’adjoindre 520 millions, qui servent eux à boucher les trous antérieurs de la dette déjà en cours. Le total est donc de 800 millions par jour à trouver, faute de quoi le défaut de paiement, puis la cessation - y compris des prestations et des salaires du secteur public - se déclenchent. Le lecteur note que ces cas ne sont pas théoriques, il en a existé de bien réels dans l’Histoire récente : Mexique (1981) ou Argentine (2001) où policiers et infirmières, par exemple,  n’étaient plus payés durant des mois. Si la dette publique vis-à-vis des investisseurs étrangers représente environ 60 % du PIB, le reste est détenue par les Français via leurs assurances-vie (nous y reviendrons). Quant à la dette d’essence privée des grands groupes, elle relève du droit étranger pour l’essentiel. Les entreprises comme la SNCF, EDF ou les banques empruntent sous contrat étranger pour financer leurs activités. La sortie de l'euro et le retour au Franc, pour souhaitable qu’ils soient in abstracto, aboutirait donc à une hausse de la prime de risque exigée par les prêteurs étrangers, et des taux payés par l'Etat et les banques. Que répond le FN ? Il autoriserait à nouveau, faisant fi des traités internationaux en vigueur, le financement de la dette par la Banque de France. Voilà une mâle attitude, mais aussitôt ce serait le retour de la planche à billets et de l’inflation, qui se traduiraient par une réduction automatique de la valeur des biens mobiliers et immobiliers, et par l’amaigrissement à bas bruit de l’épargne : avec une inflation à 8 % vos biens et économies diminuent de moitié au bout de six ans. Dans un tel contexte (sortie de l’Euro, retour au Franc avec dévaluation, augmentation des taux d’intérêt) l’assurance vie des Français  - qui abonde 40 % de la dette totale de la France - subirait une attaque frontale de grande ampleur. Votre assurance vie c’est de la dette ; les fonds en euros sont investis pour l’essentiel en obligations émises par les gouvernements français successifs aux abois. Contracter une assurance-vie consiste à échanger de l’argent bien réel - fruit d’une vente immobilière par exemple - contre des lettres de créances sans garantie claire, attendu que la France emprunte non pour investir, mais pour couvrir des déficits imprudemment engagés. Pire : votre argent sert au fond - de manière indirecte - à nourrir le veau d’or, les aides à gogo, les dépenses somptuaires, la gabegie chronique, etc. Les contribuables floués, sans souvent s’en rendre compte, permettent ainsi à nos élus de continuer à emprunter sans réformer. Pour parer aux défaillances, les assureurs constituent certes des provisions, mais limités : 70 000 €, par personne et par établissement financier. Mais il y a plus grave. Depuis 2010, le code monétaire et financier dans son article L612-33 prévoit  de «suspendre, restreindre ou interdire temporairement la libre disposition des avoirs.» En clair, si il y avait panique générale, l’argent thésaurisé ne pourrait être débloqué sans une autorisation préalable du gouvernement en place.

Bien entendu, le Front National n’est nullement responsable de cette effroyable gabegie : il en aurait hérité tout au plus, s’il avait été en mesure de gouverner. Néanmoins, l’application de son programme économique dépensier aurait produit d’innombrables effets pervers, pour les raisons suivantes : dorénavant toutes les économies sont intriquées, et la France surendettée ne dispose plus de marges de manœuvre, sauf à défier les organismes prêteurs, leur imposer urbi et orbi l’abandon des créances, sortir de l’économie mondiale.  S’isoler de la sorte ne résoudrait pas les problèmes structurels qui nous minent, aggravés chaque minute par les dépenses d’un Etat obèse et d’une dépense sociale folle, et la menace d’un terrible krach intérieur serait tangible. La sortie de l’Euro est certes un but à atteindre, mais d’une manière concertée et conjointe avec les Etats-membres, un délai allongé, et une réflexion globale sur la dette.

 


 

1 commentaire - Le programme 2017 du FN était idiot.

Jean Falcon - 12 juillet 2017 à 22:08
Excellente analyse. Une sortie unilatérale de l'Euro (et donc de l'UE) est impossible (voir mes commentaires sur le Blog gaulliste libre), sauf "d’une manière concertée et conjointe avec les Etats-membres" - là aussi, une impossibilité évidente.

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